dimanche 28 avril 2013

Les rapports de Cluny et de l’art français médiéval pour les classes nouvelles


Comment faire comprendre aux cinquièmes nouvelles les rapports de Cluny et de l’art français médiéval, 

In L’information historique, n°1 janvier-février 1948, pp33-38.


 I- L'Ordre de Cluny

Ainsi désigne-t-on l'ordre bénédictin réformé à Cluny-sur-Grosne, en 910 : de nombreux disciples de saint Benoît d'Anisne (fondateur du célèbre couvent du Mont-Cassin, en Italie) avaient essaimé en Europe; mais, si tous ne se rallièrent pas à la réforme clunisienne, par contre, d'autres, après 1098, adoptèrent la règle cistercienne.

Dès le début d'une étude sur Cluny, il faut à partir du XIe siècle, clairement distinguer :
1- les couvents de Bénédictins ou de Bénédictines restés indépendants (Ex : La Chaise-Dieu), en opposition parfois avec les Clunisiens (Ex : Saint-Martin-d'Autun).
2- les couvents qui dépendent de Cluny;
3- les couvents cisterciens.
Le sujet ainsi délimité, il convient de déterminer les traits originaux de la règle clunisienne, surtout ceux qui nous aident à comprendre dans quelle mesure il y a art "clunisien" et comment on peut en déceler les caractères dans l'ensemble de l'art médiéval.
A- L'abbaye-mère, fondée par l'abbé Bernon en 910, dédiée aux saints Pierre et Paul est dans l'obédience directe du pape, exempte de toute autre autorité diocésaine. Dans cette seconde Rome, l'abbé de Cluny fait figure de monarque, indépendant des évêques : seul qualifié pour recevoir les vœux des moines ou des prieurs, il accueille à Cluny-sur-Grosne les oblats qui, au prix d'un voyage souvent long, toujours pénible, parfois dangereux, viennent entrer en contact direct avec leur chef hiérarchique. Rien d'étonnant que l'église de Cluny (fin XIe-début XIIe siècles) soit le plus vaste édifice religieux de la chrétienté, avant la construction au XVIe siècle seulement, de Saint-Pierre de Rome.
B- Cluny, abbaye-mère, commande à des "filles", réparties pour la France seule, en sept provinces. Chaque abbaye-fille a, comme chef, un prieur, contrôlé par des visiteurs, sortes d'inspecteurs, envoyés par  l'abbé. Les visiteurs remettent leurs rapports à des "définiteurs" dont les décisions réunies constituent une sorte de code de police intérieure. D'autre part certaines maisons, sans dépendre  directement de Cluny, sont en "union de dévotion" avec elle : telles Saint-Denis, Saint-Bénigne de Dijon, Marmoutiers. La tâche du Clunisien n'est-elle pas surtout la prière et particulièrement la prière pour le repos éternel des morts ? Afin d'obtenir le maximum d'efficacité, la liturgie exige un effort collectif. Aussi Cluny représente bien la tendance "catholique" par excellence : la recherche de l'union universelle. Les "filles" dirigent donc à leur tour d'autres "filles" : de Moissac dépendent quatre couvents, de la Charité cinquante, de Saint-Géraud-d'Aurillac soixante-cinq. Quelques prieurés rayonnent à l'étranger : Sainte-Foy-de-Conques essaime en Alsace, en Angleterre, en Italie ; Saint-Gilles-du-Gard en Italie, en Pologne et même en Scandinavie.
Cette constatation nous amène à faire une remarque importante : l'universalité de l'influence clunisienne crée, dans le domaine de l'art en particulier, une certaine confusion; On peut soit exagérer l'influence de l'ordre sur les caractères généraux de l'art roman,soit, au contraire, la réduire, faute de critères indiscutables.




A suivre...

Claude Lelièvre et les classes nouvelles


Et encore sur les classes nouvelles dans le Café pédagogique du 29 mars : http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2013/03/29032013Article635001381064416077.aspx

Claude Lelièvre : Les ‘’classes nouvelles’’ : une innovation réussie interrompue… 

Claude Lelièvre nous envoie "une note sinon de pessimisme, du moins de perplexité, en ce moment de rassemblements printaniers dédiés à l’innovation"....

Le principal maître d’œuvre de ces ‘’classes nouvelles’’ a été Gustave Monod, ancien élève de l’école des Roches et directeur de l’enseignement du second degré de 1945 à 1949. Mais  ce directeur a délibérément favorisé aussi la tenue de nombreuses réunions de professeurs et d’inspecteurs engagés dans cette expérience pour qu’ils partagent et développent leurs innovations.. Et c’est ainsi que des professeurs de ces classes nouvelles développeront un outil nouvellement créé, à savoir les « Cahiers pédagogiques ».

La commission Langevin-Wallon préconisait l’ouverture de ‘’classes nouvelles’’. En octobre 1945, 200 ‘’classes nouvelles’’ de sixième ouvrent  dans les différents types d’établissement de l’époque (  à savoir lycées, collèges et cours complémentaires ). Ces ‘’classes nouvelles’’ englobent donc l’ensemble d’une sorte de premier cycle qu’elles structurent en deux années d’observation ( 6° et 5° ), suivie de deux années d’orientation progressive ( 4° et 3° ). Les lettres et les sciences ( assurées chacune par un professeur ) occupent la matinée. Les après-midis sont réservées  ( avec un horaire conséquent ) à la musique, aux arts plastiques, à l’éducation physique et à des travaux manuels éducatifs. Les effectifs sont réduits à 25 ; il y a de nombreuses séances en demi-classe et des activités dirigées ( deux heures d’abord, puis cinq heures par semaine ) au cours desquelles les élèves réalisent des travaux – mais aussi des devoirs – sous le regard de leurs professeurs. Cela s’accompagne également d’enquêtes et d’études de milieu, et du développement du travail en groupe. Appelés à travailler en équipe, les professeurs se réunissent chaque semaine en conseil de classe ( une heure à l’emploi du temps ). Lorsque Gustave Monod quitte la direction du second degré, 18 000 élèves se trouvent dans 750 ‘’classes nouvelles’’ regroupées dans 200 établissements. Une belle extension a donc eu lieu, avec succès.

Mais la poussée démographique et l’afflux des élèves dans le second degré font apparaître comme un luxe ces classes de 25 élèves et leurs conditions de fonctionnement particulières. Enfin et surtout, avec la mise sous l’éteignoir du plan Langevin-Wallon, cette tentative de démocratisation par le renouvellement pédagogique et structurel s’enlise. Une circulaire du 30 mai 1952 supprime en fait les "classes nouvelles" sous prétexte d’étendre leurs méthodes à toutes les classes. Et, en 1953 , les "classes nouvelles" fonctionnant dans les lycées sont transformées en "classes pilotes" qui donneront naissance  à des lycées dits "expérimentaux" (  et en définitive des exceptions isolées ). Ainsi va parfois le monde de l’innovation…

Claude Lelièvre