jeudi 25 août 2016

Visite du Louvre



Dans le Bulletin de la société des professeurs d'histoire et de géographie (juin 1929 p.222-223), Madeleine fait le compte rendu d'un ouvrage sur le Louvre;
Rappelons que Madeleine a souvent accompagné ses élèves pour des visites des monuments historiques.  

Louis Hautecoeur. — Histoire du Louvre : le Château, le Palais, le Musée, des origines à nos jours (1200-l928). Edité par l'Illustration, Paris.
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5520640b/f65.image.r=schnerb?rk=386268;0


" Cet ouvrage n'est pas seulement un livre d'art : l'auteur veut aussi montrer les événements qui ont eu le Louvre pour cadre, événements qui expliquent souvent les vicissitudes de l'histoire du monument lui-même. — Aussi ce volume est à la fois remarquable par la richesse de l'illustration, et l'abondance des documents, comme en témoigne une abondante bibliographie. Des plans historiques, précis et clairs, une table topographique, permettent au lecteur de suivre l'auteur dans le dédale des bâtiments de ce qui fut château, puis palais, puis musée.

« Palais du Louvre et des Tuileries (plan historique) »
Publié dans Louis Hautecoeur, Histoire du Louvre. Le château, le palais, le musée des origines à nos jours (1200-1928), Paris,L’Illustration, s.p.

Des reproductions de tableaux illustrent l'énumération, un peu aride parfois, des transformations successives de l'édifice ; M. H. connaît admirablement l'iconographie de son sujet, et a su utiliser des images contemporaines.

Pour érudit qu'il soit, l'auteur sait agrémenter son texte d'anecdotes qui l'égaient, de petits détails pittoresques : il ne nous déplaît pas d'apprendre qu'un lit valait sous Charles V, 3 sols 3/4 — ou qu'au XVIIIe siècle, les élèves-artistes logés au Louvre, irrespectueux de leur demeure somptueuse, perçaient les toits pour aller s'y promener.

L'auteur ne perd d'ailleurs jamais de vue l'histoire générale : pour lui, le Louvre est le symbole de l'esprit de suite des Français : monument royal, il n'a été achevé que sous la Seconde République et Napoléon III qui l'ont adapté.

Louis Hautecœur, « Projet d’une salle de spectacle par N.-M. Potain (1763) », L’Architecture, t. XXXVII, n° 3, 10 février 1924, p. 34-35

L'histoire du Louvre est étroitement unie à celle de l'histoire de la France : il est d'abord construit par Philippe-Auguste qui dresse cette « forteresse sourcilleuse » au carrefour de quatre fiefs, pour défendre sa capitale : château féodal, le Louvre bénéficie des essais architecturaux antérieurs.
Avec Charles V, la forteresse devient une habitation, le Louvre n'est plus qu'une « résidence bien défendue », mais « aimable » Charles V aime la somptuosité, et fait richement meubler son château, mais il mène une vie simple, et son jardin n'est qu'un « jardin de curé ».

Abandonné au xv° siècle, le Louvre redevient un édifice vraiment royal avec François 1er' : signe des temps nouveaux, celui-ci fait abattre la tour et Pierre Lescot construit un ensemble décoratif et harmonieux. Le Louvre est lié alors à tous les événements tragiques du XVIe siècle.

Les Bourbons sont dominés par le « grand dessein » : la réunion du Louvre aux Tuileries ; Henri IV commence, Louis XIII voudrait et ne peut continuer. Louis XIV pense bien plus à Versailles, mais Colbert veille à la vieille demeure royale : il fait compléter le bâtiment de Lescot, et c'est lui qui fait construire la colonnade.

Au XVIIIe siècle, nous assistons à « l'invasion » du Louvre : Académies diverses, artistes y logent. Des baraques s'adossent aux murs, et même il est « livré à la paperasse ». Cependant, dès cette époque, apparaît l'idée de musée ; sous Louis XV déjà les « salons » font fureur : l'origine, c'est l'habitude d'exposer les œuvres des Académiciens dans le « Salon » du Palais.
Napoléon, pour en faire un gigantesque musée destiné à abriter les dépouilles des palais d'Europe, reprend le grand dessein des rois, mais Percier et surtout Fontaine ne peuvent aboutir : cependant ils dégagent le Louvre, aménagent des salles, complètent la décoration, restaurent la colonnade.
Les régimes suivants accommodent le Louvre à leur goût : Louis XVIII et Charles X sont préoccupés de rappeler dans la décoration la continuité de la monarchie. Enfin, après 1850, le « grand dessein » est réalisé: Visconti, puis Lefuel en sont les artisans. Soucieux de l'effet d'ensemble, Lefuel a sans doute un peu trop sacrifié au goût ostentatoire de son temps, mais il a su achever sans trop de disparate un édifice si souvent compromis dans son développement.

Ainsi, l'ancienne forteresse, le palais des Valois et des Bourbons, est devenu le Musée de la Troisième République. Peu de monuments, certes, ont eu une histoire aussi remplie, et cependant aussi continue. M. H. nous conduit avec, une sûreté rare de 1200 à 1928; peut-être regrette-t-on parfois une surabondance de détails : la précision touche à la minutie ; mais il faut reconnaître que l'auteur ne s'égare jamais, et qu'il nous a donné un guide précieux pour les visiteurs du Musée, un ouvrage utile pour nos travaux pratiques, une histoire souvent pittoresque et des textes originaux.

Madeleine Schnerb (Clermont-Ferrand).

Les illustrations sont issues de :
Antonio Brucculeri, « Architecture classique, émergence et vulgarisation d’une catégorie, ou les raisons d’une exposition et de son catalogue », in Antonio Brucculeri (dir.), Louis Hautecœur et la tradition classique, Paris, INHA (« Les catalogues d'exposition de l'INHA »), 2008, [En ligne], mis en ligne le 29 juillet 2011, consulté le 21 août 2016. URL : http://inha.revues.org/2928

mercredi 24 août 2016

Vive l'inspection!

Ce florilège de rapports d'inspection et d'appréciations pédagogiques (de 1928 à 1939) à quelques jours d'une nouvelle rentrée scolaire (2016-2017) afin d'inviter les enseignants à relativiser...

« ...Vint la 3e. en section A c’était la classe de Mme Schnerb. La Renaissance et ses beautés : ô merveille, elle nous les commentait à l’épidiascope. Les Grandes Découvertes : elle nous fit entrevoir ce qu’on n’appelait pas encore « la mémoire des vaincus » et ce qu’on savait déjà être à l’origine de la misère espagnole. Et voici la Réforme... »

En écho à ces extraits, voir "Inspections..." et http://madeleineschnerb.blogspot.fr/2012/03/un-enseignement-vivant.html et http://madeleineschnerb.blogspot.fr/2012/03/un-enseignement-vivant-2.html


Avril 1928
« ...  Accompagne les élèves pour des visites des monuments historiques...»
« ... Manque de la distinction de manières et de langage qui en sont le complément naturel ».

Janvier 1929 : 
Chef d’établissement
« Une familiarité un peu excessive avec les élèves dont la discipline en cours laisse à désirer.»

Inspecteur général
« La classe est vivante mais trop remuante.. manière exagérément familière du professeur...
 clarté, tranquillité...»

1930 : Inspecteur d’Académie
« compétence... mais enseignement diffus et languissant, pas d’action profonde sur la classe.»

« Leçon intéressante bien construite. Seule la manière un peu trop familière, par instant proche de la vulgarité...»
« Mais la présentation manque de fermeté de chaleur. La langue est banale, assez commune. Ce n’est pas la manière d’un professeur actif. Tout au contraire, tout ce qu’elle dit est comme empreint d’une nonchalance générale. Cette mollesse est sensible surtout dans la discipline de la classe où il règne une sorte de laisser-aller; les élèves se tiennent mal sans que le professeur fasse la moindre observation. L’ensemble est médiocrement satisfaisant.»

Février 1931
« Avec des dons intellectuels et un savoir indéniable, madame Schnerb n’est pas un professeur de premier ordre. Elle manque de fermeté, d’élévation, de finesse  aussi. La classe est mollement conduite.»

Février 1932
« Le don pédagogique paraît lui manquer »

30 décembre 1932  (chef d’établissement)
« Professeur intelligent, sans finesse ni tact, attitude un peu familière avec les élèves
ne manque ni de connaissances ni de sens historiques.»

1933 (signé par Madeleine) rapport de l’Inspecteur général
 Classe de 6e : « intelligente, parle avec aisance, a de l’autorité sur ses élèves et les fait travailler. Elle doit veiller sur son langage parfois un peu relâché.»

1934
« Facilité dont elle est un peu victime ».

Avril 1934 (le recteur)« Des qualités ; enseignement animé et intéressant... mais plusieurs élèves parlent à la fois.»

Excursion au lac d'Aydat en juin 1934 : Madeleine avec sa classe

1936
« Bien des réserves à faire sur son enseignement, pourrait devenir meilleur si madame Schnerb se surveillait davantage.»

Mai 1937 : Inspecteur général Huby (signé par Madeleine)
« Aisance, familiarité souriante à l’égard des élèves, une parole élégante et facile...
Peut-être une fermeté plus vigoureuse dans les méthodes d’enseignement comme dans le tenue générale de la classe donnerait des résultats plus satisfaisaient (...) plus dignes en tout cas de la culture et du dévouement de madame Schnerb.»

Janvier 1939 Paris
« Bon professeur enseignement bien documenté vivant et précis. A assumé la surveillance des collections, leur enrichissement, et elle s’acquitte de cette tâche avec beaucoup de méthode.»

Avril 1939 : Jules Isaac
Leçon sur l’art contemporain avec des images :
« Enseignement vivant, animé, personnel, bien fait pour entraîner et intéresser les élèves... m’a permis d’apprécier la liberté et la sincérité avec lesquelles s’expriment les élèves de Mme Schnerb... travail reste très collectif... mais que les élèves perdent l’habitude des réponses en choeur.
Dirai-je d’un tel enseignement qu’il est d’un maître impressionniste ? Il est vivant à coup sûr et entraînant. Ce sont là des qualités précieuses.»

mardi 23 août 2016

Llauro dans les Aspres

Et en 1980, "Llauro dans les Aspres"conclut longuement cette série dans cette même revue des Sévriennes (numéro 99, mars 1980) et Madeleine en fait un petit opuscule déjà évoqué.









lundi 22 août 2016

Llauro à l'heure du choix

E 1975, Madeleine écrit un nouvel article : "Llauro à l'heure du choix" (3e volet du tryptique) pour la revue , Sévriennes d'hier et d'aujourd'hui, numéro 82, décembre 1975.

Les lignes de l'article publié en 1970 ont été rédigées en 1969. "En septembre 1971, je laissais pressentir que quelque chose était en train de bouger. En 1975, il semble opportun d'essayer de faire le point en étudiant "sur le tas" sans idée préconçue, ce qu'un village catalan fait pour résoudre ses propres contradictions, afin, non seulement de survivre, mais de vivre tout bonnement."




dimanche 21 août 2016

Un village des Aspres, le "balcon du Roussillon" face aux problèmes de notre temps : Llauro"


"Un village des Aspres, le "balcon du Roussillon" face aux problèmes de notre temps : Llauro" est le second article que Madeleine publie dans "Sévriennes d'hier et d'aujourd'hui" (numéro 65, Septembre 1971).
Elle le rédige car l'article précédent a eu plus d'audience qu'imaginé ; et donc pour mettre en évidence les mutations en cours, elle publie ce court article.
"En écrivant sur un sujet très mince et non "exotique", je ne pensais vraiment pas capter l'attention d'un vaste public. Or les tirés à part, destinés dans mon esprit surtout à des amis curieux comme moi de géographie sociologique, eurent un succès local inattendu"...




samedi 20 août 2016

Un village à la recherche d'une survie : LLAURO (Pyrénées-Orientales)

Madeleine écrivit quatre articles sur son village d'élection : Llauro, pour la revue Sévriennes d'hier et d'aujourd'hui, le premier en 1970 : Un village à la recherche d'une survie : LLAURO (Pyrénées-Orientales).
Sévriennes d'hier et d'aujourd'hui, numéro 59 Mars 1970, pp 2-9





vendredi 19 août 2016

Llauro, lieu de vie et passion

C'est en 1961 que le couple Schnerb acquiert une petite maison au cœur
du vieux village de Llauro dans les Aspres (Pyrénées Orientales).
Un an après la mort de Robert, Madeleine décide de s'y installer. Elle s'intègre parfaitement à ce petit monde aux antipodes de ses mondes antérieurs, de ses lieux de vie précédents. D'ailleurs dans un premier temps, elle vivait principalement dans un appartement à Perpignan, pour reprendre le fil de sa vie d'étudiante et satisfaire son goût pour les activités culturelles, expositions, cinéma, théâtre, concerts... Llauro jouant le rôle de maison de campagne.
Mais assez vite, c'est dans ce village qu'elle choisit de vivre. Et elle se passionne pour ce microcosme auquel elle consacre quelques articles parus dans la revue des Sévriennes ; en 1980, elle fait une petite brochure (ci-dessous).


En parallèle, à la fin des années 70 elle est le pivot de la vie culturelle du village, en œuvrant à sa renaissance. Elle préside ainsi l'association  pour la promotion culturelle de Llauro.



mercredi 17 août 2016

Second voyage au Maroc -décembre 1962- janvier 1963

Second voyage en 1962-1963 :

Après la mort de Robert, elle fait un second séjour, cette fois-ci à Casablanca où se trouve alors son fils. Elle y séjourne en décembre 1962 - janvier 1963 et fait de nombreux déplacements vers Rabat, Marrakech, Sidi Rahal...

Madeleine devant le lycée Moulay Abdallah - décembre 1962

mardi 16 août 2016

Voyage au Maroc 1961 - 4

4-
L’urbanisme est une autre illustration de cette juxtaposition brutale. Toutes les villes marocaines sont faites de de deux villes plus ou moins éloignées : la Médina – et la Mellah qui la flanque – la ville européenne où une large Avenue de la république a été baptisé en Av. Mohammed V.

C’est à Marrakech où peut-être le heurt entre les deux genres d’urbanisme est le moins brutal car l’Av. Moh V semble l’allée triomphale qui conduit à la Koutoubia. Mais cependant la Medina reste un monde à part, un monde fermé alors que la ville européenne est par-dessus tout une ville ouverte tracée pour s’ouvrir toute grande à la circulation automobile.

Meknès est au contraire une des villes où les distances entre les deux cités est la plus marquée. Aussi la Medina est-elle bordée d’une rue européenne qui a dû être le quartier résidentiel des premiers occupants avant que l’autre côté de la colline ait été bâti. Si nous avons vu Marrakech avec une Médina grouillante d’un peuple affairé, nous avons vu Meknès Medina comme vidée de sa substance, puisque toute la Médina était sortie pour voir Tito passer !! Nous pouvions ainsi imaginer ce que ce serait que la sortie de la Medina à l’assaut du quartier européen ! Plus que des discours cette vision peut donner l’idée de la « Peur » qui peut dresser les deux mondes l’un contre l’autre ! et maintenant au Maroc les hommes de la Sécurité Nationale en bel uniforme rentrent chez eux le service fini, ….. en Medina ! On comprend que les Français prennent peur, parfois ! Ainsi peu à peu les Marocains s’installent dans les magasins et les immeubles neufs. Ils se peut que parfois la baignoire serve à la culture de la menthe !!! Argument enfantin qui ne peut empêcher le mouvement annoncé.
Comme il ne m’appartient pas de décrire les villes marocaines, (d’autres l’ont fait) je veux précisément tâcher d’évoquer Sidi Rahal, parce que c’est une cité en création… qui avortera peut-être, mais qui peut nous aider à imaginer ce que furent Marrakech, Meknès ou Fez il y a cinquante ans.

Sidi Rahal tire son nom d’un Saint : aussi la cité est-elle dominée par un ensemble de sanctuaires, lieux anciens de pèlerinage, sur une sorte de butte témoin au-dessus de l’oued. Là aussi est le cimetière juif.
C’est en contre bas de la colline que se tient le souk, tous les jeudis, souk en plein air, très animé où une foule de Marocains s’agite autour de poteries, des articles de quincaillerie, des légumes, de la viande (vérifiée maintenant par le Service sanitaire, et pendue sous des abris récemment rendus obligatoires !!). Au-delà habitent les Marocains, dans des maisons-tanières, collées les unes contre les autres, et où les Européens ne se montrent guère, maisons qu’on distingue mal du paysage.
C’est dans la plaine à 1 km environ de là que le « Jeune Maroc » à l’instar des Français a planté sa cité administrative et enseignante, au-delà du Palais du Palais du caïd ancienne résidence féodale.
Ce Palais du Caïd, gardé (image 1026) par des Mogarzis (Moghazni ?), a fière allure et ressemble à tous les palais marocains : fortifications extérieures, beau jardin, mosaïques, beaux plafonds en bois. Le bureau des PTT s’y abrite. Dans une aile le Caïd a prêté une belle salle pour le foyer culturel.

Non loin de là un ancien palais du khalifat a été la première école de Sidi Rahal et est maintenant l’internat, outillé à la française, convenable : que d’écoles françaises occupent elles aussi d’anciens châteaux, aussi mal adaptés à ce petit univers concentrationnaire qui est un internat. Bernard l’a décrit de plume allègre lorsqu’il y enseignait. Maintenant les classes sont toutes installées dans des bâtiments neufs sans caractère mis au milieu d’un large espace, car les futures avenues sont encore terrains vagues. C’est de part et d’autre de ces futures artères que sont disséminées les villas occupées par le personnel administratif, médical (l’infirmerie), enseignant, villas de style méditerranéen commodes et banales : toutes ces maisons sont données en fonction des droits ou des occupations et sans discrimination de race ou d’origine."